Home A la une « Le HCRRUN veillera à faire servir à la victime le montant correspondant au degré de préjudice subi sans y ajouter ni retrancher un centime », Mme Awa Nana-Daboya, présidente du HCRRUN

« Le HCRRUN veillera à faire servir à la victime le montant correspondant au degré de préjudice subi sans y ajouter ni retrancher un centime », Mme Awa Nana-Daboya, présidente du HCRRUN

« Le HCRRUN veillera à faire servir à la victime le montant correspondant au degré de préjudice subi sans y ajouter ni retrancher un centime », Mme Awa Nana-Daboya, présidente du HCRRUN
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Le HCRRUN entame ce 12 décembre, la phase des indemnisations des victimes politiques liées aux violences politiques qu’a connues le Togo, de 1958 à 2005. La première étape de cette phase de réparations concerne 137 victimes dites vulnérables identifiées sur toute l’étendue du territoire. Dans cette interview, la présidente du HCRRUN, Mme Awa Nana-Daboya revient sur les modalités et la catégorisation des indemnisations en fonction des préjudices.

 

Vous entamez une nouvelle étape du programme de réparations. Qu’est ce qui sera fait concrètement au cours de cette nouvelle étape ?

Cette étape que nous entamons le 12 décembre prochain est celle des indemnisations proprement dites. Elle va consister dans une première partie, à la prise en charge des victimes vulnérables. Vous n’êtes pas sans savoir  que parmi les victimes identifiées par la CVJR pour bénéficier des réparations, il y a celles qui traînent encore des séquelles dans leur corps et qui ont besoin d’une prise en charge médicale et psychologique. Ce sont des personnes que nous appelons « victimes vulnérables » et pour lesquelles, outre les indemnisations pécuniaires telles que fixées, bénéficieront d’un réexamen médico-psychologique pour évaluer leur degré de vulnérabilité en temps réel. Elles sont au nombre de 137 victimes répandues sur toute l’étendue du territoire. Ensuite nous poursuivrons avec l’indemnisation des autres victimes de 2005 telles que recensées pour couvrir le montant des deux milliards pour la première tranche des victimes de 2005, soit le reste des 2475 victimes.

 Vous parlez de prise en charge médicale et psychologique, en quoi cela va consister ?

Comme je vous le disais, les victimes vulnérables ce sont des personnes hommes ou femmes portant encore des séquelles physiques et qui nécessitent des soins ou  des séquelles morales  nécessitant un accompagnement psychologique. C’est pour cela que le HCRRUN a conclu un  partenariat avec l’ONG AIMES-Afrique qui va donc installer son plateau technique au Centre de Conférences de l’Hôtel du 2 février à Lomé. Les victimes seront convoyées de leur lieu de résidence à Lomé,  prises en charge logistiquement et seront consultées par des médecins spécialistes regroupés sous la représentation de AIMES-Afrique. En fonction du diagnostic qui sera dressé pour chaque victime, des soins pourront être prodigués sur place ou les victimes pourront également être convoyées dans les Centres hospitaliers adéquats nationaux régionaux et même à l’étranger.

Après ces soins médicaux et psychologiques, ces victimes vulnérables auront-ils droit aux indemnisations pécuniaires ?

Bien sûr ! Ces soins sont complémentaires des indemnités qui leur seront versées. Je rappelle que le travail avait déjà été effectué par la CVJR en son temps qui a défini les différents cas de préjudices et fixé des montants afférents selon qu’il s’agisse de préjudice moral, de préjudice corporel, de préjudice de carrière, de préjudice matériel ou enfin de préjudice de décès /de disparition. Le programme tel que élaboré par la CVJR et annexé aux recommandations a déterminé le quantum à payer à chaque type de préjudice. Et donc, en fonction de chaque catégorie le programme a retenu les degrés tels que léger, bas, moyen, grave ou très grave. Le HCRRUN par conséquent veillera à faire servir à la victime tel montant correspondant au degré de préjudice subi sans y ajouter ni retrancher un centime. Le HCRRUN informe que le payement des indemnisations aux victimes se fera par chèque payable sur toute l’étendue du territoire dans toutes les succursales de la banque UTB et donc ce sera des payements visibles transparents et traçables.     

Au cours de votre tournée d’information en mai dernier vous avez parlé d’un total de 2475 victimes, soit une partie des victimes des événements de 2005, qui seront concernées par la première phase des réparations. Est-ce toujours le cas ?

Oui, c’est toujours le cas. Toutefois, il faut préciser que dans cette première tranche correspondant au montant des deux milliards censés couvrir les 2475 victimes, l’opération d’indemnisation des 137 victimes vulnérables est à soustraire des 2475 victimes vulnérables. En effet, il s’agit de 122 victimes recensées en 2005  et auxquelles nous avons ajouté 15 victimes des autres périodes en raison justement de l’urgence à les prendre en charge. Par conséquent après les 137 victimes, l’indemnisation des autres victimes devra aller vite au fur et à mesure que les fonds seront libérés.

Pourquoi avez-vous choisi de convoyer toutes les victimes vers Lomé ?

La nécessité de leur prise en charge médicale et psychologique a pour objectif de faciliter la gestion des soins à prodiguer ainsi que de rapprocher les plateaux techniques mises en place par AIMES-Afrique des deux grands centres hospitaliers du pays que sont les CHU Sylvanus Olympio et Campus de Lomé. Les médecins de AIMES-Afrique pourront faire appel, si les circonstances l’exigent, à d’autres compétences  plus facilement joignables à Lomé que dans les autres villes du pays. De même qu’en cas de nécessité pour une évacuation sanitaire ou des soins extérieurs, Lomé est plus indiqué pour faciliter les démarches préalables à ses soins.    

  Des années se sont écoulées depuis les événements de 2005 et la fin des travaux de la CVJR, comment comptez-vous procéder pour retrouver les victimes ?

C’est pratiquement chose déjà faite. En effet lors des dépositions à la CVJR, les victimes ont été enregistrées sur la base de leurs identités, de leur numéro de téléphones, des adresses de personnes à contacter et aussi des contacts d’autres membres de leurs familles etc. Elles font l’objet d’une fiche d’identification portant tous les éléments nécessaires et logée dans les bases de données que la CVJR a légué au HCRRUN. Toutefois, si malgré toutes ces données, une victime ne répond pas à l’appel du HCRRUN, nous mettrons à contribution les autorités administratives (préfets), traditionnelles ou religieuses et les membres des comités de paix ou toutes autres personnes ressources afin qu’elles soient retrouvées. Je précise que des simulations de prise de contact effectuées au début de ce mois avec les victimes listées ont donné des résultats positifs de 80 à 85%. Enfin le HCRRUN envisage d’afficher les noms des victimes afin qu’elles soient toutes informées à l’avance.

Qu’allez-vous faire si la victime n’est plus de ce monde ?

Hélas ! Tout en nous inclinant devant la mémoire de telles victimes nous voudrions dire que les premiers appels téléphoniques effectués par nos services  nous révèlent déjà ces cas. Et bien, en droit, il y a ce qu’on appelle les ayants droits ; c’est à dire les bénéficiaires des victimes disparues. Ce sera ces ayants droits qui bénéficieront de l’indemnisation de leurs parents victimes décédées conformément à la législation en vigueur en matière de succession de notre pays.

Une victime qui aurait engagé des frais pour réparer le préjudice subi peut-elle espérer se faire rembourser ?

En fait, au cours de cette opération les victimes seront réévaluées en fonction de leur état actuel. Et des soins leur seront prodigués si nécessaire. Mais le montant de l’indemnisation prévue par la CVJR est en quelque sorte le remboursement des frais déjà engagés donc il n’y aura pas autre chose.